jeudi 21 juillet 2011

Up Tight !

Distribué par la Paramount, Point noir est le premier film sorti d'un grand studio à s'intéresser de prêt à l'effervescence politique dans la communauté afro-américaine... Cela donne un film magistral au casting pléthorique et réalisé par Jules Dassin, victime des purges anti-communistes des années 50...

UP TIGHT ! - Jules Dassin (1968)

Cleveland, 1968, quatre jours après l’assassinat de Martin Luther King. Johnny Wells (Max Julien) est à la tête d'un petit groupe d'activistes "black Power", il dévalise un entrepôt de munitions et met la main sur un important stock d'armes. Tank (Julian Mayfield) -un ouvrier au chômage porté sur l'alcool- aurait du faire partie du coup, mais lorsque ses camarades viennent le chercher, il est trop saoul ; il est exclue de l'organisation. En plus, il a des problèmes avec sa petite amie, Laurie (Ruby Dee).
Bien sûr, la police recherche les coupables du vol (qui se termine en fusillade avec un gardien) et met à prix la tête de Johnny. Tank cède aux sirènes de Clarence (Roscoe Lee Browne), un indic, et dénonce son ami et ex-camarade contre un forte récompense.
Le groupe militant dirigé par B.G. (Raymond St. Jacques) va alors tout faire pour mettre la main sur le traître...

Jules Dassin signe là un excellent film. L'idée la plus lumineuse -d'autant plus qu'elle est menée à bien- consiste en l'adaptation du classique de John Ford : The Informer. Le script original de 1935 situait l'intrigue en Irlande et suivait un traître à l'IRA ; c'est avec beaucoup de finesse que Dassin adapte le scénario -avec l'aide de Julian Mayfield (qui joue Tank) et Ruby Dee- dans le Cleveland de 1968, où la communauté noire vient de perdre un de ses principal leader, et que le combat politique non-violent vient symboliquement mourir avec lui, nombre de militants choisissant la voie de l'auto-défense et du "Black Power".

Formellement, rien de très révolutionnaire dans la réalisation de Jule Dassin. Sur les titres de Booker T. & the M.G.s -mieux connus que le film lui-même- , Dassin nous fait voyager à travers la ville de Cleveland (rarement utilisée comme décor), encore secouée par les émeutes consécutives à l'assassinat de Luther King :les rues sombres, les terrains vagues, les chantiers de constructions fleurissant, les ponts métalliques géants... Il sait cependant la tension de chaque scène, l'effervescence consécutive au meurtre du révérend King, les contradictions intérieures de Tank. Le résultat donne un polar urbain politique comme finalement la blaxploitation en offre bien peu. Enfin, on ne sait pas vraiment avec lequel de ses nombreux personnages Dassin est le plus proche, ni s'il soutient les revendications du "black power" ; il montre juste une empathie véritable et un respect pour chacun et pour le combat pour les droits civiques.

Ce qui fait aussi son caractère magistral, c'est l'impressionnant casting mêlant des comédiens confirmés tel l'imposant Raymond St. Jacques, la splendide et combative Ruby Dee et Roscoe Lee Browne ; des acteurs plutôt habitués à des seconds rôles comme Janet MacLachlan, Max Julien et Juanita Moore (elle débute tôt avec Cabin in the Sky, et on la retrouve aux cotés de Max Julien dans The Mack et Thomasine & Bushrod) ; d'autres enfin qui font leurs classes et retourneront plus ou moins dans les productions soul qui vont se multiplier : Dick Anthony Williams -qui pour une fois ne joue un pimp exhubérant-, Robert DoQui, Ji-Tu Cumbuka (Top of the Heap, Blacula, Mandingo, Dr. Black, Mr. Hyde, Racines, Ebony, Ivory and Jade, Moving, Harlem Nights), Ketty Lester (Blacula, Uptown Saturday Night, House Party 3), Van Kirksey (Cotton Comes to Harlem et Scream Blacula Scream), Anthony Chisholm, John Wesley, Leon Bibb... La romancière Alice Childress (à qui l'on doit entre autre A Hero Ain't Nothin' But a Sandwich) fait une brève apparition.

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